La maladie d’Alzheimer fait peur en raison de la plus ou moins longue dégradation progressive jusqu’à l’issue fatale. Selon le regard que l’on porte sur cette maladie comme sur la bouteille vide ou pleine on s’attardera à ne voir que les aspects négatifs : détérioration, désorientation, grabatisation etc ou humanité, affectivité, vie émotionnelle et psychique persistantes.
« Humanitude » (1), « Validation » (2), deux mots clefs, 2 phares, 2 lumières qui éclairent notre regard trop souvent sombre et négatif qui se porte sur les personnes âgées, sur les malades d’Alzheimer.
Un jour ou l’autre nous serons tous confrontés à cette maladie dans notre entourage proche ou familial.
Pourquoi ne pas y regarder de plus près ? Cette maladie serait-elle honteuse pour être aussi taboue ? De quoi avons-nous peur en fait, de notre propre vieillesse ? De la folie ? Pourquoi cette maladie est-elle si peu, si mal diagnostiquée et si peu annoncée par les médecins ?
Pourquoi cette maladie est-elle si peu traitée alors que les traitements existent. Sous prétexte qu’ils ne guérissent pas l’impasse est faite sur le bien être, les améliorations et la stabilisation de la maladie qu’ils apportent comme si les malades étaient dans une impasse fatale qui suscite trop souvent indifférence et rejet. Pourquoi cette maladie est-elle gommée, reniée si fréquemment par les proches qui ont vite fait de rendre responsables les malades comme s’ils « faisaient exprès, semblant » en les culpabilisant encore plus ?
Valider leurs émotions, leurs sentiments, c’est freiner l’évolution de la maladie, c’est retarder la grabatisation. La validation est une thérapie qui permet de communiquer avec les malades d’Alzheimer (ou personnes souffrant de syndromes apparentés). Cette technique « leur permet de rencontrer quelqu’un qui les écoute avec empathie et qui, sans les juger, accepte leur vision de la réalité(…). La validation est basée sur le principe qu’il y a une raison derrière tout comportement. Comprendre pourquoi les personnes très âgées et désorientées ont tel ou tel comportement et accepter que ce comportement soit le leur, est la clé qui permettra de les valider » (3)
N.Feil a mis en place toute une série de techniques de validation, de communication opérationnelles.
Y.Gineste enseigne depuis plus de 25 ans, en situation réelle de soins, la « philosophie de l’humanitude » et la « méthodologie de soins Gigeste-Marescottti » conçues avec R. Marescoti. Les premiers résultats de cette méthode montrent l’apaisement des « comportements d’agitation pathologique » dans plus de 8 cas sur 10 (4) et de « résoudre de 75 à 95 % des comportements d’agitation ou d’agressivité des hommes vieux atteints de syndromes cognitivo-mnésiques » (5)
Comme son nom l’indique, la technique est basée sur l’humanité des relations, regard, parole, toucher qui agissent en boucle , « rebouchage sensoriel », consolidation émotionnelle, « stratégies de diversion, capture sensorielle » (6)
Cette méthode comme celle de N. Feil retarde la grabatisation et plus encore permet une fin de vie acceptable.
Dans l’unité Alzheimer de l’hôpital de Tonneins (Lot et Garonne), par exemple, aucune perte de poids n’est observée, la capacité de sourire apparaît durer jusqu’aux derniers jours, la capacité d’être debout ne se perd que dans les toutes dernières semaines.
En 3 ans, dans cette unité où vivent 30 personnes atteintes de syndromes cognitivo-mnésiques, la plus longue période où une personne n’avait plus la force de tenir debout n’a duré que 10 jours » (7)
Il est donc possible d’apporter du bien être jusqu’à la fin.
Pourquoi voudrions-nous que les malades d’Alzheimer s’adaptent à notre univers et non l’inverse ? Existe-t-il vraiment un mur entre les bien-portants et ces malades ?
Le plongeon rétrograde dans le passé, perturbe l’entourage familial et institutionnel, ce qui se conçoit, mais faut-il pour autant le contrecarrer, le nier, le censurer ?
N’auraient-ils pas le droit de revivre leur passé ? Pourquoi rajouter une souffrance en leur interdisant, en se moquant ?
N’auraient-ils pas le droit d’être âgés tout simplement. Ne seraient-ils plus des sujets à part entière ? La maladie aurait-elle anéanti le sujet avec ses affects, ses émotions, son psychisme propre à chaque être humain ? Bien sûr que non, rassurons nous mais a-t-on encore le droit de vieillir ?
Sujet: LA MALADIE D'ALZHEIMER 
Ven 18 Jan - 18:43
